far far there's this little girl, she was praying for something good to happen to her Dans un petit quartier de la périphérie de Boston, accoudée à la fenêtre de sa chambre, une jeune femme, le regard dans le vide, pensait à ce qui venait de lui arriver. Alors qu'une larme perlait sur sa joue, elle l'essuya en vitesse. Pleurer ? Non, il n'en valait pas la peine. Et dire qu'elle avait attendu ce jour avec impatience pendant des mois et des mois. Et dire que ce jour était enfin arrivé. Et dire que jamais elle n'aurait imaginé que tout ça se fusse passé de la sorte. « Joyce, on y va.». Joyce tourna la tête vers son interlocuteur. Il était méconnaissable dans son costume. Pour ainsi dire, Joyce ne l'avait jamais vu autrement que dans son bleu de travail. Elle lui sourit. « J'arrive.» Joyce se leva, parcourut une dernière fois la pièce du regard. Puis, s'emparant de sa valise, elle ferma la porte et suivit son père. Ce jour là, le jour de son mariage, ce n'était pas avec son mari qu'elle partait, mais avec son père, avec sa mère, avec sa soeur. Elle quittait Boston pour toujours, gardant en elle le souvenir pénible de cette affreuse journée. Tout avait pourtant bien commencé. Elle avait enfilé sa robe de mariée cousue par sa belle mère, ses cheveux étaient magnifiquement coiffés quant aux bijoux qu'elle arborait, des reliques familiales, ils brillaient de milles feux. Les invités, peu nombreux, mais tous très précieux, s'étaient installés dans l'Eglise, quant à Joyce, elle avait marché, aussi gracieusement qu'elle le pouvait, au bras de son père, jusqu'à l'autel, jusqu'à son mari. Elle avait rencontré Henry il y a deux ans de cela, et ils étaient tombés fous amoureux l'un de l'autre. Elle n'en avait jamais beaucoup su sur lui, il avait toujours préféré rester mystérieux et elle avait toujours respecté ça. Ils s'aimaient, ils s'aimaient tellement. Et puis, tout à coup, les portes de la petite chapelle se sont ouvertes, des coups de feu sont partis, Henry poussa Joyce derrière l'autel pour qu'elle se protège. Les bruits des tirs résonnaient dans la chapelle, si bien qu'on ne savait pas trop s'ils s'étaient arrêtés ou pas. Lorsque le silence se fit à nouveau, Joyce se releva, abasourdie, décoiffée, salie. Tout le monde était à terre. Personne n'avait été blessé. Certains se relevaient, sous le choc, d'autres étaient restés par terre, de peur que cela ne reprenne. Mais aucune trace d'Henry. Enfin... Une traînée de sang parcourait le chemin de l'autel, comme si on l'avait tiré jusqu'à la sortie. Joyce se mit à courir, suivant la traînée de sang. Mais dehors, rien. Plus rien. Elle s'écroula. Elle cria.

these streets will make you feel brand new, theses lights will inspire you Pour Joyce, ce fut le retour à la case départ, le retour aux sources. Elle rentra à New York avec sa famille et décida de faire table rase du passé. D'oublier les trois dernières années de sa vie. Elle ne comprenait pas ce qui s'était passé. Chez sa belle famille, tant que chez sa propre famille, c'était l'incompréhension totale. Qui étaient les agresseurs ? Pourquoi en voulaient-ils à Henry ? Ces questions ne trouvèrent jamais de réponse. Et Joyce décida de ne pas le rechercher. La police fut alertée, Joyce témoigna, mais les recherches ne menèrent à rien. On supposa qu'il avait des comptes à régler avec la mafia de Boston et qu'ils s'étaient sûrement débarrassé de lui. Joyce décida d'oublier, parce que vivre dans l'attente permanente était devenu insupportable. Elle avait perdu beaucoup de poids, avait mauvaise mine et ne sortait plus. Alors un jour, elle décida de repartir à zéro. Elle était née à New York, elle y avait passé la plus grande partie de sa vie. Elle allait faire comme si Boston n'était jamais arrivé. Sa mère lui trouva du travail chez la famille chez qui elle travaillait : les Harper, une des plus grandes dynastie de New York. Le travail l'empêchait de penser à ce qui c'était passé. Lorsqu'elle passait le balai, qu'elle faisait les lits, elle ne pensait plus qu'à la poussière et aux faux plis. Elle se lia d'amitié avec les autres domestiques. Au fil du temps, ils étaient devenu sa deuxième famille. Elle n'avait fréquenté aucun homme depuis la mort, ou plutôt la disparition d'Henry. Mais une chose en entraînant une autre, elle se rapprocha d'un autre domestique, William. William était très intelligent. Même s'il n'avait pas assez d'argent pour faire des études, il avait lu des centaines de bouquins et savait tellement de choses que Joyce en était toujours épatée. Il était aussi une sorte de rebelle. Il détestait son travail de domestique, alors il faisait ce qu'il pouvait pour apporter un peu de joie à son travail. Cela impliquait surtout faire des farces aux propriétaires su type lit en portefeuille, pénurie de papier toilette... Sans le savoir, William fut d'une grande aide à Joyce. Il lui permit de se remettre, petit à petit, de sa perte, et de laisser aller.

can you lie next to her and confess your love as well as your foly, leave me to the truth and i will follow you with my whole heart Les années passèrent. Joyce travaillait toujours chez les Harper. Elle oubliait, petit à petit, qu'elle avait perdu son fiancé. Et puis un jour, tout bascula à nouveau. Mais avant de raconter ce qu'il s'est passé ce jour-là, il faut revenir quelques semaines en arrière. Alors que Joyce allait rentrer chez elle après une journée de travail, alors qu'elle descendait les escaliers vers la porte de sortie, elle entendit un cri strident, venant d'en haut. Sans se poser de questions, elle monta les escaliers quatre à quatre pour arriver dans la chambre de Lisa Harper. Une dizaine de domestiques étaient déjà là, silencieux. Elle entendait des sanglots, elle voyait les visages pâlir... Et puis elle la vit. Pendue au plafond, flottant dans les airs. Le vent, provenant de la fenêtre laissée entr'ouverte frappait contre sa robe qui virevoltait doucement. Lisa Harper s'était suicidée. Joyce retint un cri et mit la main devant sa bouche. Comment ? Pourquoi ? Lisa ! Elle avait tout, pourquoi un tel geste...Personne n'aurait pu s'en douter. Miss Lisa était une personne assez étrange. Grande, fine et gracieuse, une rumeur courrait selon laquelle elle avait été danseuse étoile à Paris. Elle se tenait toujours droite, ne faisait jamais un bruit et arborait toujours ce sourire qui à force, devenait faux. Joyce n'avait jamais su beaucoup de choses à propos de Miss Lisa, puisque celle-ci ne lui avait jamais adressé la parole, à part pour lui dire bonjour. Mais elle avait entendu dire que Lisa était impliquée dans des magouilles, ou encore qu'elle était alliée à la famille Gambino. Beaucoup de bruits courraient sur la maitresse de maison, mais comment savoir la vérité ? Suite au décès de Miss Lisa, Joyce et quelques uns de ses camarades fut licenciée. Mr Harper n'avait plus besoin de leur services. Depuis les faits, Joyce n'a toujours pas retrouvé du travail. En revanche, alors qu'elle croyait qu'il ne s'agissait que d'une rumeur sans fondement, elle reçut, elle aussi, une lettre. Une grosse enveloppe cartonnée l'attendait dans sa boîte aux lettres. Ce qu'elle contenait ? Une photo annotée. La photo d'Henry, à New York, datée du 10 septembre 1953. La note ? "He's alive."